20 octobre 2016

Part 3: Des cinq baies à Puerto Velero

Initialement, nous pensions quitter le mouillage vers 22h pour traverser le golfe de Santa Marta de nuit et nous présenter à Barranquilla au petit matin.

Après plusieurs jours de navigation et d'escales sur cette côte colombienne, nous nous sommes rendus à l'évidence que les journées étaient nettement plus stables côté météo que les nuits. Sur la région Nord,  les orages violents sévissent presque toutes les nuits.
De plus,  nous avons envie de profiter de cette navigation et qui sait, peut-être verrons nous les pics Bolivar et Colomb enneigés.  Ce serait LA chose à ne pas rater de la mer des Caraïbes. 

Une fois toutes les données d'entrée compilées:

nav de jour au max + 60 nm à faire + courants contraires à prévoir + arrivée à Puerto Velero de jour = nouveau programme :

- Réveil à 2h30 du mat
- Départ à 3h
- Estimation d'arrivée à l'embouchure de la Magdalena vers 12h
- Estimation d'arrivée à Puerto Velero vers 15/16h

En voilà,  une chouette mission !

Lorsqu'à 3h, nous sortirons de notre baie protégée nous ne regreterrons pas notre choix.
À bâbord, d'où l'on vient, le festival des éclairs est encore au Rdv.
À tribord, où l'on va, le ciel est dégagé. Notre amie la lune pleine nous ouvre la voie.



Sur cette dernière nav avant quelques semaines de repos à la marina, Ti'Amaraa se la joue Diva.
Toute la garde-robe,  absolument toutes les voiles dans toutes les configurations ont été sorties.
Eole nous a servi toutes les allures et toutes les forces de vent, histoire de ne pas nous ramollir.
Du portant sous Parasailor,  du près sous GV et Génois, une zone avec un vent de travers à 30/35 nds nous obligeant à prendre un ris puis à nouveau du portant et du travers tranquilou pour finir sous code zéro et GV (relâchée). 
Aucune manoeuvre ne nous aura été épargnée.  Décidément la route pour la Colombie est intense.

Au soleil levant,  nous profitons d'un calme pour prendre notre petit déjeuner face à la Sierra Nevada.



Alors Oui! On voit bien ces deux pics majestueux de presque 5900 mètres d'altitude du large.
Et Oui! On distingue clairement les neiges éternelles sur leur sommet.
Enfin ''clairement"...avec avec de bonnes jumelles de là où nous sommes.

Il faudra, pour le coup nous croire sur parole car on a essayé d'immortaliser le moment mais ce n'est vraiment pas net. 
Cette histoire de neige nous aura bien amusé.  On l'aura cherchée. On se sera même préparés, vous l'avez certainement vu dans le bonus de la vidéo. La case de l'office du tourisme nautique by Ti'Amaraa est cochée. 

Le summum restera pour nous le fameux passage de la Boca de Ceniza, l'embouchure de la Magdalena au niveau de Barranquilla.


Barranquilla Skyline ;-)

Avant toutes choses,  on confirme qu'il faut ABSOLUMENT le passer de jour. Le plan d'eau est jonché de débris en tous genres charriés par le fleuve, principalement végétaux.  Nous croiserons ''la route'' de troncs d'arbres aussi longs que Ti'Amaraa flottant entre deux eaux.
Après le festival de Cannes et ses flashs, la Foire du tron(c).


Y'a quoi là dessous??? 

Le vert émeraude de la mer des Caraïbes s'assombrit au fur et à mesure de l'approche. On distingue bien à l'horizon la ligne de démarquation entre le vert (déjà bien chargé)  et le marron terre de l'estuaire. 
Pendant des miles, nous nous frayerons un chemin en zigzaguant parmi les obstacles flottants et les gros cargos en manoeuvre d'entrée au port sur cette eau saumâtre n'invitant pas à la baignade.


Marron... Droit devant! 

Le vent faible (10 nds) et le peu de houle nous permettent de faire un maximum de route sous voile. Nous voulons éviter autant que possible d'utiliser les moteurs dans ce bourbier.



C'est sans compter sur les courants induits par ce mélange des eaux. Au plus fort,  nous aurons presque 3 nds de courant contre vent, houle et route. Nestor, notre pilote, a beau faire des merveilles. Il s'essouffle et a du mal avec le peu de vitesse résiduelle à contrer la dérive.  Comme on l'excuse.
Une fois propulsé par nos deux Yanmar, Ti'Amaraa reprend sa route et une allure normale.
En revanche, après la Boca,  en continuant vers Puerto Velero,  on vivra plus de 2 nds de courant favorables.  Youpi !!! Ça pulse !!

Nous retrouvons petit à petit une jolie eau. Après les dunes de sable des Caps, la forêt tropicale des cinq baies, la chaîne de montagne de Sierra Nevada, nous longeons, à présent, une côte vallonnée verdoyante parsemée de jolis petits villages aux jardins vert gazon. Serions nous arrivés en Normandie équatoriale ?
La Colombie a une multitude de facettes.

À l'approche de Puerto Velero, la cartographie est out!!!  C'est une première. Il nous est arrivé de noter quelques décalages en particulier en dehors des sentiers battus comme aux Aves. Mais ici, c'est toute une langue de terre qui n'apparaît ni sur nos Navionics,  ni sur Opencpn. En arrivant du Nord, d'après elles on pourrait tracer direct sur la marina. C'est faux!  Les petites déferlantes nous confirment bien au contraire que la langue meurt doucement dans la mer et qu'il faut prendre l'entrée balisée bien sud.
Nous savons pourquoi nous nous sommes levés de bonne heure.

Entre Ti'Amaraa et Puerto Velero, le trajet le plus court n'est PAS la ligne droite! Sauf avec des roulettes 

Terre à bâbord! 

Il est 14h30 lorsque l'on pointe nos coques entre les deux bouées d'entrée du chenal de la marina.
Un mélange de sentiments étrange nous envahit.
Heureux, tout d'abord, d'avoir passé sans la moindre casse ces fameux Caps et les pièges de cette côte.
Excités d'arriver et de préparer notre escale sudaméricaine.
Tristes aussi que la route s'arrête. Comme pour la transat,  nous vivions dans une telle bulle fusionnelle tous les deux avec Ti'Amaraa et les éléments qu'il est toujours étrange lorsqu'on la crève et qu'il faut retourner ''à la civilisation''.
Cette semaine restera la navigation la plus technique et la plus exaltante depuis notre départ.  Nous lui attribuons la deuxième place au palmarès des nav' de notre coeur juste derrière la transatlantique. 

Ainsi s'achève près de 700 miles  nautiques d'une route intense en émotions, riche en panoramas, attachante aux premiers contacts et complète en manoeuvres.
Un petit film récap a été mis en ligne,  il y a quelques jours,pour ceux qui l'aurait loupé.



Une question nous taraude : 
Mais où sont les bateaux de voyage ?
Nous n'avons croisé AUCUNE voile lors de cette longue nav' alors que nous sommes dans la bonne saison, dans une fenêtre météo adéquate et sur la route sud classique pour continuer vers l'ouest.
La marina est par ailleurs quasiment vide. Du fait de sa jeunesse, elle est méconnue des navigateurs. Nous y consacrerons un article plus tard. 




Est-ce les âmes chagrines, en alimentant Radio Ponton de faux commentaires sur ce pays,  qui découragent des candidats ?
Amis navigateurs,  vous pouvez venir dans ces eaux sans crainte.
N'en déplaise à l'un des reporters en chef de cette radio  qui nous a dit il y a encore quelques semaines à peine :
- En Colombiiiiie !!!
- Faut pas y aller.... 
- Et faut surtout PAS mouiller sinon c'est une balle dans le corps. 

Vies avec ton temps Pépère...
Arrêtes de regarder des films sur le cartel de Medelin et Pablo Escobar.

Le monde change ;-)...

        ... Et nous nous régalons de le traverser


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